La révision de la prévoyance vieillesse piétine. Alors que notre espérance de vie augmente, les avoirs épargnés doivent durer plus longtemps. Mais comme le taux de conversion dans la prévoyance professionnelle (LPP) n’a pas changé depuis des années, le calcul ne fonctionne plus et l’on continue d’observer un financement croisé des jeunes vers les personnes âgées. Cela ne correspond pas à l’idée du système de prévoyance suisse, qui repose sur trois piliers, à savoir le pilier étatique (AVS/AI), le pilier professionnel (prévoyance professionnelle, LPP) et la prévoyance privée (3a/3b).
L’AVS est une assurance sociale classique à laquelle cotisent les personnes actives. Celles et ceux qui gagnent plus cotisent plus. Toutefois, une rente maximale AVS s’applique, on ne reçoit donc pas forcément plus à la retraite. Grâce à ce système, les personnes qui gagnent le plus financent les rentes des faibles revenus dans le premier pilier. L’année dernière, l’électorat suisse a décidé de fixer l’âge de la retraite dans l’AVS à 65 ans pour les femmes et les hommes, qui sont donc ici sur un pied d’égalité. Selon l’Office fédéral des assurances sociales, les femmes paient 33 % et les hommes 67 % des primes dans le pot commun de l’AVS. Inversement, les femmes perçoivent 57 % des prestations, les hommes 43 %. L’âge commun de la retraite ne crée donc pas d’inégalités entre hommes et femmes.
En revanche, le deuxième pilier, la prévoyance professionnelle (LPP), n’est pas une assurance sociale. Dans la LPP, chacune et chacun économise pour soi. Plus le revenu est élevé, plus le capital épargné est important. Dans le cadre de la LPP, la moindre activité lucrative des femmes a donc un impact négatif sur leur capital de vieillesse. Dans le cadre du débat politique actuel sur la réforme de la LPP, la Berne fédérale s’interroge actuellement sur la manière dont les femmes devraient percevoir des rentes plus élevées. Il est en particulier question de rendre assurables les revenus les plus bas afin de mieux couvrir les temps partiels. Ce point est toutefois controversé. Certes, les personnes salariées verseraient plus d’argent dans le capital de vieillesse, mais en fin de compte, elles en auraient moins à dépenser sur le moment. Le travail s’en trouverait également renchéri, car les employeurs devraient déjà cotiser à la LPP pour les faibles revenus.
Le problème fondamental du faible montant des rentes féminines n’en serait pas nécessairement résolu. Celui-ci ne vient d’ailleurs pas tant du salaire des femmes que du choix du modèle familial. Alors que les femmes célibataires reçoivent aujourd’hui une pension même légèrement supérieure à celle des hommes célibataires, la situation est différente pour les femmes mariées avec enfants.
La plupart du temps, les femmes s’occupent de l’éducation des enfants et ne travaillent pas du tout ou seulement à un très faible taux d’occupation durant ces années-là. Lors de leur retour au travail, elles sont en outre désavantagées au regard de leur évolution de carrière, car les années passées avec les enfants sont souvent des années professionnelles manquées. Autre conséquence de leur absence sur le marché du travail: elles gagnent souvent moins.
Les femmes ne devraient donc pas miser sur des solutions politiques pour améliorer leur prévoyance vieillesse personnelle. La politique ne peut pas compenser l’absence de versements dans le capital d’épargne de la LPP. Les femmes doivent s’occuper elles-mêmes de leur prévoyance vieillesse. Mais elles n’ont pas à faire face seules, les maris peuvent également apporter leur contribution.
La vie de famille devrait être organisée de sorte que la femme puisse elle aussi continuer à travailler avec un taux d’occupation aussi élevé que possible. En effet, chaque franc versé dans la LPP vient s’ajouter au capital de vieillesse propre avec des cotisations supplémentaires de l’employeur. Au cours de la vie active, le taux de conversion n’est pas prévisible. Il est toutefois possible d’influencer le montant du capital épargné. Si l’on décide de peu travailler lorsque les enfants sont encore à la maison, mais que l’on souhaite tout de même bénéficier du deuxième pilier par l’intermédiaire de son employeur, il est possible de cotiser volontairement dans la LPP.
Quoi qu’il en soit, il faut absolument cotiser dans le troisième pilier, la prévoyance privée. En particulier lorsque l’on touche un revenu provenant d’une activité lucrative, mais que celui-ci est si faible qu’aucun montant LPP n’est exigé. Dans ce cas, des versements dans le pilier 3a seraient tout de même possibles (20 % du salaire net). Ce montant peut être déduit du revenu imposable. Dans ce contexte, les maris ont le devoir de penser non seulement à leur prévoyance privée, mais aussi à celle de leur femme. Si les hommes maintiennent leur taux d’occupation pendant cette période, le budget du ménage devrait également prévoir des versements réguliers dans le troisième pilier du mari et de sa femme. Si l’on décide de ne pas travailler du tout jusqu’à ce que les enfants aient quitté le nid, il faut si possible investir de l’argent ailleurs.